
Cette année, pour la première fois de son histoire, Wimbledon a remplacé ses arbitres de ligne par une technologie qui constitue une évolution au traditionnel Hawk-Eye. Pourtant, malgré la précision qu'elle offre, plusieurs joueurs ont déjà exprimé leur mécontentement vis-à-vis de son efficacité, notamment suite à la controverse qui a entouré le match entre Sonay Kartal et Anastasia Pavlyuchenkova.
Depuis quelques jours, plusieurs joueurs de tennis ont publiquement exprimé leurs doutes quant au système électronique. A cet effet, Jack Draper et Emma Raducanu, les numéros un britanniques, ont mis en doute la justesse des décisions, tandis que la Suissesse Belinda Bencic s'est montrée plus directe en pointant les problèmes qu'occasionnent l'IA.
"En vérité, oui, je n'ai pas confiance, même si je ne veux pas trop m'étendre sur le sujet, mais c'est stressant, a-t-elle soufflé. Parfois, une balle est clairement sortie, on a envie d'arrêter le jeu, mais on se souvient qu'il faut continuer à courir pour chaque balle. Ce n'est pas seulement dans mes matchs, ça arrive à tout le monde. Le défi est de rester concentrée et de continuer à courir même si on a vu la balle sortie. Ce qui est arrivé à Pavlyuchenkova l'autre jour est incroyable".
Effectivement, là où la réticence à l'égard de ce nouveau système est de plus en plus répandue dans le tennis et même si le "hawk-eye" est un élément incontournable des matchs depuis de nombreuses années ailleurs, l'affaire Pavlyuchenkova n'a fait qu'aggraver la situation.
Le 6 juillet 2026, alors que la Britannique Sonay Kartal et la Russe Anastasia Pavlyuchenkova s'affrontaient sur le Court Central, une erreur hallucinante a failli remettre en cause l'intégrité de la rencontre. A égalité (4-4) durant la première manche, Kartal voyait finalement son revers envoyer la balle en-dehors des limites du terrain. Or, contre tout attente, le système Hawk-Eye était resté silencieux et, après délibération, l'arbitre avait ordonné que le point soit rejoué. De quoi provoquer la frustration de Pavlyuchenkova qui avait déclaré "Vous m'avez volé mon jeu."
Pourtant, si l'organisation a présenté ses excuses, elle a également tenu à préciser que l'IA n'y était pour rien. En réalité, le problème rencontré par Pavlyuchenkova était lié à une erreur humaine : un opérateur a accidentellement désactivé une partie des caméras d'un simple clic sur son ordinateur.
Sally Bolton, directrice générale du All England Club, a d'ailleurs assuré que "le système de suivi de balle a fonctionné de manière optimale et efficace" tout au long du tournoi. En revanche, suite à cet incident, elle a promis : "Nous avons entièrement revu nos processus et apporté les changements appropriés". Autrement dit, les caméras ne pourront plus être désactivées manuellement pendant un match.
Le système d'appel électronique de ligne en direct (Live ELC) de Wimbledon est une évolution du système Hawk-Eye traditionnel, utilisé depuis 2007. La principale différence réside dans son fonctionnement en temps réel : il utilise un réseau de caméras de vision artificielle qui suivent la balle et signalent automatiquement une sortie lorsqu'elle sort.
Auparavant, Hawk-Eye ne servait qu'à réviser les décisions à la demande des joueurs ; à présent, il est désormais l'arbitre principal pour toutes les lignes.
Si les joueurs s'en plaignent aujourd'hui, regrettant l'absence d'humains remplacés par des robots ("Nous perdons un peu du charme du jeu. Comme pendant le Covid, quand nous n'avions pas de ramasseurs de balles. Cela devient un peu bizarre, comme si les robots dirigeaient", dixit Pavlyuchenkova) l'IA serait pourtant efficace.
Des études montrent que les systèmes électroniques utilisés dans le sport sont nettement plus précis que les arbitres humains. L'une d'elles a révélé que les arbitres de ligne commettent des erreurs dans 27 % des cas où une vérification à la loupe est nécessaire, soit une erreur tous les 17,4 jeux. Le système a prouvé sa fiabilité dans de nombreux sports depuis plus de dix ans, et l'Open d'Australie et l'US Open l'ont pleinement intégré ces dernières années.
La résistance à la technologie dans l'arbitrage ne se limite pas au tennis. La VAR au football suscite une controverse constante. De plus, l'Hawk-Eye est également utilisé au volley-ball, au cricket et même au football pour les buts fantômes, des situations où la technologie a également suscité la controverse. En réalité, le sport est généralement très réticent aux changements technologiques.
Quand bien même les machines commettent moins d'erreurs que les humains, la perception est souvent différente. Un rejet qui peut s'expliquer par le fait qu'une erreur humaine est plus facilement acceptable qu'une erreur technologique quand celle-ci est censée être infaillible. Aussitôt, cela fait monter les tensions et théories...
Pourtant, de nombreux problèmes attribués à l'IA sont en fait des erreurs de mise en œuvre ou des erreurs de décisions humaines qui accompagnent le système, comme ce fut le cas cette fois-ci à Wimbledon.
Certes, la technologie n'est pas infaillible, mais elle est statistiquement plus fiable que toute alternative humaine disponible. Mais alors, pourquoi nous ne lui faisons pas confiance ? Selon Gina Neff, professeure à Cambridge, "À l'heure actuelle, dans de nombreux domaines où l'IA influence nos vies, nous pensons que les humains comprennent le contexte bien mieux que les machines".
Et d'ajouter : "La machine prend des décisions en fonction des règles qu'elle a été programmée pour suivre. Mais les humains sont très doués pour intégrer de multiples valeurs et considérations externes : la bonne décision peut parfois sembler injustifiée". L'experte a ensuite conclu : "C'est à l'intersection entre les personnes et les systèmes que nous devons parvenir à une décision juste. (...) Nous devons tirer le meilleur parti des deux mondes pour prendre les meilleures décisions."


